L'Éducation permanente, qu'est-ce que c'est ?
Selon l'article 1er du décret du 17 juillet 2003 une organisation d’éducation permanente a pour objectif de favoriser et de développer, principalement chez les adultes...
- une prise de conscience et une connaissance critique des réalités de la société ;
- des capacités d’analyse, de choix, d’action et d’évaluation ;
- des attitudes de responsabilité et de participation active à la vie sociale, économique, culturelle et politique.
Ainsi, les associations d’éducation permanente des adultes travaillent à développer les capacités de citoyenneté active et la pratique de la vie associative. Nombre d’entre elles consacrent une attention particulière aux publics socio-culturellement défavorisés.
Actuellement, quelque 280 asbl sont reconnues dans le cadre du décret de 2003, et occupent environ 2 300 travailleurs équivalent temps plein.
Un peu d’histoire
Historiquement, l’enracinement de l’éducation permanente, en tant que concept et démarche culturelle, se trouve dans l’éducation populaire qui a joué un rôle d’émancipation culturelle et sociale des travailleurs à partir des années vingt. Dans le contexte de la loi des huit heures, ont été votés les arrêtés royaux de 1921 et 1925 relatifs à ce qu’on qualifiait alors d’"œuvres complémentaires à l’école".
La multiplication et la diversification des associations, ainsi que l’amplification de leurs programmes, induisit en 1971 l’adoption d’un nouvel arrêté royal renforçant la prise en compte et le soutien de ces organisations, sur le plan régional ou national. C’est également alors qu’apparut pour la première fois dans les textes le vocable d’"éducation permanente", avec le souci de concerner tous les citoyens, et plus seulement les milieux dits "populaires". Les organisations encore reconnues en vertu de l'arrêté de 1971 sont désormais dites "de loisirs culturels".
Le renforcement du soutien structurel franchit une nouvelle étape avec le décret du 8 avril 1976 : "Décret fixant les conditions de reconnaissance et d’octroi de subventions aux organisations d’éducation permanente des adultes en général et aux organisations de promotion socio-culturelle des travailleurs", dont l’article 1er reprenait déjà la définition de l’éducation permanente telle qu’elle est encore comprise aujourd’hui.
L’éducation permanente aujourd’hui
Dans le cadre du nouveau décret, adopté en 2003, l’éducation permanente en Fédération Wallonie-Bruxelles reste à bien des égards spécifique dans l’espace européen, par sa démarche, par son inscription dans le champ de la culture et par la politique de reconnaissance et de soutien structurel par les pouvoirs publics. L’originalité de cette démarche culturelle est en outre proche de préoccupations et d’enjeux qui trouvent actuellement une large réceptivité tant en Belgique qu’en Europe, via "l’éducation non formelle", "l’éducation à la citoyenneté" ou encore "l’éducation tout au long de la vie".
L’éducation permanente et l’ADDE
Les visées de l’ADDE asbl, qui ont été réfléchies dans le cadre de l’élaboration d’une charte de valeurs et de principes, sont formulées en termes de missions à l’article 2 de ses statuts, lequel est libellé comme suit :
« Art. 2. Elle se donne pour mission de promouvoir les droits au service de la justice sociale. Dans cette optique, elle a notamment pour objet:
1. Le soutien, l’assistance juridique et l’accompagnement social des étrangers, des personnes d’origine étrangère, et des membres de leur famille.
2. L’étude des questions juridiques liées aux migrations et à la diversité culturelle, la publication d’analyses, et la diffusion d’informations actualisées.
3. L’information et la sensibilisation de la société civile et des pouvoirs publics.
4. L’organisation de conférences, formations et séminaires afin d’informer toute personne et de former notamment les professionnels du secteur.
5. L’échange d’expertise et la participation à l’action collective, en particulier au sein de plateformes associatives et dans le cadre d’un travail en réseau national, européen et international.
6. L’intentement d’actions en justice contre toute mesure portant atteinte à l’objet social de l’association, tel que précisé aux points 1 à 5.
L’association réalise son objet social dans le respect des valeurs et principes définis par sa charte ».
Si les visées de l’ADDE asbl peuvent chacune être mises en lien avec les visées du décret, les liaisons sont particulièrement fortes en ce qui concerne :
- L’analyse critique de la société, la prise de conscience et la connaissance critique de la société : elles se traduisent par les valeurs d’indépendance, de militance d’expertise et de responsabilité que défend l’association et qui permet une démarche d’analyse objective et critique, ancrée dans la connaissance des problématiques sociales, au service de l’égalité et du progrès.
- Le développement de la citoyenneté active et l’exercice des droits sociaux, dans des perspectives d’égalité et d’émancipation individuelle : ces visées sont rencontrées à travers la mission de promotion des droits au service de la justice sociale exercée en accord avec les valeurs et principes suivants : la défense de l’égalité des droits pour tous, l’octroi de l’accompagnement sans discrimination et le positionnement de l’humain en première ligne (principe d’humanité) afin de rendre le bénéficiaire acteur dans une perspective d’émancipation[1].
- L’appui aux associations dont l’objectif est de favoriser chez les adultes une prise de conscience et une connaissance critique de la société, des capacités d’analyse, de choix et d’action ainsi qu’une participation active à la vie sociale, économique, culturelle et politique : ce soutien ressort particulièrement de l’objectif de diffusion d’information, de publication d’analyses et de formation de toute personne et notamment des professionnels du secteur, ainsi que de la mission d’échange d’expertise et de points de vue au sein de plateformes associatives et dans le cadre d’un réseau national et international d’associations.
Afin d’encadrer ces visées, cinq thématiques d’action en éducation permanente ont été définies en 2011 de la manière suivante :
- La défense et la promotion du droit à vivre en famille: dans la mesure où, selon la Déclaration universelle des droits de l’homme (art. 16.3), « La famille est l'élément naturel et fondamental de la société et a droit à la protection de la société et de l'Etat », et où cette question nous semble devenir, s’agissant des migrants, un important défi, nous avons voulu faire du droit à vivre en famille une thématique spécifique de notre action.
- La défense du respect de la dignité humaine: cette thématique renvoie à l’un de nos principes de travail fondamentaux, à savoir l’humanité. Les politiques et les réglementations en matière d’immigration sont de plus en plus en rupture avec ce principe et « fabriquent » des situations contraires à la dignité humaine. Bien plus, des droits fondés au départ sur le respect de la dignité humaine, tel que le droit à l’aide sociale ou à l’accueil, sont ouvertement instrumentalisés afin de contraindre les personnes à quitter la Belgique, sans égard pour leur situation individuelle.
- Stimuler l’intégration, la citoyenneté active, ou la participation active : l’analyse des enjeux et de l’interaction entre la capacité pour le migrant de « trouver sa place » et celle de la société d’accueil de « pouvoir faire place » est un exercice crucial. L’accès à l’emploi, à l’éducation, aux droits politiques sont les pendants juridiques d’une problématique complexe que nous rencontrons tous les jours. Ce paradigme nous semble aujourd’hui particulièrement questionné par la thématique de l’ « intégration », régulièrement posée comme une condition d’accès aux droits et formulée de façon à la fois simpliste et inaccessible.
- Œuvrer à renforcer la protection des demandeurs d’asile et celle des personnes vulnérables : cette thématique vise non seulement la protection internationale donnée aux réfugiés et la protection subsidiaire, toutes deux prévues par le droit européen, mais également la nécessité de protection d’autres catégories, tels les mineurs étrangers non accompagnés, les personnes souffrant de maladie graves, les victimes de violences intrafamiliales ou les victimes de traite des êtres humains.
- La promotion de l’égalité des droits : ce dernier thème renvoie à une valeur fondamentale de notre action qui prône l’égalité des droits pour tous. Elle est défendue et questionnée, par exemple, à travers le regroupement familial (différencié selon la nationalité du regroupant : ressortissant de pays tiers ; Belge, citoyen européen non belge) ou la défense de certaines minorités particulièrement discriminées.
[1] Mus par la charte des valeurs, les différents services de l’ADDE sont attentifs à développer la capacitation du public et à améliorer la communication interculturelle en expliquant, dans le cadre d’une consultation individuelle, les enjeux qui sous-tendent chaque demande et en stimulant le réseau des consultants et leurs ressources, lorsque cela est possible.