Le statut de réfugié
Qui est « réfugié »?
Le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui craint avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays.
Conditions de reconnaissance du statut?
La notion du « réfugié » est définie à l’article 1 de la Convention de Genève. L’interprétation de cette définition est complexe. De nombreux outils sont disponibles pour en comprendre les finesses (par exemple, le « Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés » du Haut Commissariat des Réfugiés des Nations Unies).
La présente fiche donne un aperçu des principaux éléments constitutifs de la définition.
Chaque état détermine les procédures qu’il applique en vue d’examiner si un demandeur d’asile réunit les critères définis par la Convention pour être reconnu comme tel. Cependant, pour les instances d’asile, la référence fondamentale pour la définition de réfugié reste l’article 1 de la Convention de Genève.
La crainte avec raison
L'élément de « crainte », qui est un état d'esprit et une condition subjective, est précisé par les mots «avec raison». Ces mots impliquent que ce n'est pas seulement l'état d'esprit du demandeur d’asile qui détermine sa qualité de réfugié, mais que cet état d'esprit doit être fondé sur une situation objective. Les mots «craignant avec raison» recouvrent donc à la fois un élément subjectif et un élément objectif et, pour déterminer l'existence d'une crainte raisonnable, les deux éléments doivent être pris en considération.
Les déclarations du demandeur ne peuvent pas être prises dans l'abstrait et elles doivent être considérées dans le contexte général d'une situation concrète. En général, la crainte exprimée doit être considérée comme fondée si le demandeur peut établir, dans une mesure raisonnable, que la vie est devenue intolérable pour lui dans son pays d'origine pour les raisons indiquées dans la définition ou qu'elle le serait, pour les mêmes raisons, s'il y retournait.
Il n'est pas nécessaire que les arguments invoqués se fondent sur l'expérience personnelle du demandeur. Ainsi, le sort subi par des parents ou des amis ou par d'autres membres du même groupe racial ou social peut attester que la crainte du demandeur d'être lui-même tôt ou tard victime de persécutions est fondée.
Il appartient à la personne qui réclame le statut de réfugié d'établir, elle-même, qu'elle craint avec raison d'être persécutée.
La crainte d'être persécuté n'est pas censée être réservée aux personnes qui ont déjà été persécutées; elle peut être également le fait de celles qui veulent éviter de se trouver dans une situation où elles pourraient l'être.
Les actes de persécution
La loi cite des exemples de formes de persécution :
- violences physiques ou mentales, y compris les violences sexuelles;
- mesures légales, administratives, de police et/ou judiciaires discriminatoires;
- poursuites ou sanctions disproportionnées ou discriminatoires;
- refus d’un recours juridictionnel se traduisant par une sanction disproportionnée ou discriminatoire;
- poursuites ou sanctions pour refus d’effectuer le service militaire, en particulier en cas de conflit lorsque le service militaire supposerait de commettre des crimes ou d’accomplir des actes relevant des clauses d’exclusion;
- actes dirigés contre des personnes en raison de leur sexe ou contre des enfants.
Les persécutions doivent être prises en compte, qu’elles émanent de l’Etat, de partis ou d’organisations qui le contrôle, ou encore d’autres acteurs non étatiques lorsque l’Etat ou un autre acteur de protection ne veut ou ne peut accorder une protection effective.
Les motifs de la persécution
Pour être reconnue réfugiée, une personne doit démontrer qu’elle risque une persécution pour l’une des cinq causes suivantes :
a) la «race» : des considérations de couleur, d’origine ou d’appartenance à un groupe ethnique déterminé;
b) la «religion» : le fait d’avoir des convictions religieuses ou de ne pas en avoir, la participation à des cérémonies de culte, les actes religieux ou expressions d’opinions religieuses ainsi que les formes de comportement fondées sur des croyances religieuses ou imposées par celles-ci;
c) la «nationalité» : ne se limite pas à la citoyenneté, mais recouvre, entre autres, l’appartenance à un groupe soudé par son identité culturelle, ethnique ou linguistique, par ses origines géographiques ou politiques communes, ou par sa relation avec la population d’un autre Etat;
d) l’appartenance à un « certain groupe social » ; un groupe doit être considéré comme un certain groupe social lorsque, entre autres:
– ses membres partagent une caractéristique innée ou des racines communes qui ne peuvent être modifiées (par exemple le sexe, l’orientation sexuelle, l’âge, les liens familiaux), ou encore une caractéristique ou croyance à ce point essentielle pour l’identité ou la conscience qu’il ne devrait pas être exigé d’une personne qu’elle y renonce (par exemple l’affiliation à un syndicat ou à une organisation de défense des droits de l’homme), et
– ce groupe a une identité propre dans le pays en question parce qu’il est perçu comme étant différent par la société environnante;
e) les «opinions politiques» : les opinions liés aux acteurs de persécution et à leurs politiques ou méthodes, que ces opinions, idées ou croyances se soient ou non traduites par des actes de la part du demandeur.
Se trouver hors du pays dont elle a la nationalité
Il faut que la personne ait quitté son pays pour pouvoir demander à bénéficier du statut de réfugié. La demande d’asile ne peut être introduite que sur le territoire, ou à la frontière. Il n’est pas possible d’introduire une demande d’asile à l’ambassade belge à l’étranger.
Le risque de persécution s’apprécie vis-à-vis du pays d’origine ou, en ce qui concerne un apatride, vis-à-vis du pays de résidence habituelle.
Du fait de cette crainte, ne pouvoir où ne vouloir se réclamer de la protection de ce pays
Lorsque dans une partie du pays d’origine, il n’y a aucune raison de craindre pour le demandeur d’asile d’être persécuté et qu’il est raisonnable d’estimer que le demandeur peut rester dans cette partie du pays, le statut de réfugié sera refusé. C’est ce qu’on appelle l’alternative de fuite interne.
Lors de l’analyse de la possibilité de protection à l’intérieur du pays, les autorités devront tout d’abord vérifier si la question est pertinente dans le cas d’espèce et, ensuite, si elle est raisonnable. Si la question n’est pas pertinente, il sera inutile d’examiner si la zone proposée serait une possibilité raisonnable. Par exemple, cette évaluation n’est normalement pas nécessaire lorsque la persécution redoutée émane d’agents étatiques, dans la mesure où ces derniers sont d’ordinaire en mesure d’agir dans l’ensemble du territoire. De même, dans le cadre de l’analyse de la pertinence, il convient également d’évaluer si la région est généralement habitable, accessible d’un point de vue pratique, légal et sécuritaire.
La deuxième évaluation qui doit être faite est, outre l’examen de la crainte fondée de persécution, celle de savoir s’il pourrait raisonnablement et en toute sécurité se réinstaller, sans épreuve indue, dans une autre partie de ce pays.
Clauses d’exclusion
Une personne qui remplit tous ces critères peut tout de même être exclue de la protection :
- si elle bénéficie déjà d’une protection ou d’une assistance de la part des Nations Unies
- si elle est considérée comme ne requérant pas de protection internationale parce qu’elle bénéficie déjà d’un statut dans un autre pays que le pays dont elle a la nationalité
- si elle a commis des :
- Crimes contre la paix, crimes de guerre ou crime contre l’humanité ;
- Crimes graves de droit commun;
- Actes contraires aux buts et principes des Nations Unies.
- si les circonstances qui justifiait sa protection ont completement disparues
- s'il constitue ou est considéré comme constituant un danger pour la sécurité nationale
- s'il a été reconnu comme réfugié sur base d'une fraude
Durée et fin du statut de séjour, et documents délivrés
Interdiction de refoulement
En aucun cas, l’étranger auquel le statut de réfugié a été octroyé ne peut être éloigné vers le pays qu’il a fui parce que sa vie ou sa liberté y était menacée.
Statut de séjour ?
La personne reconnue réfugiée par le Commissaire Général aux Réfugiés et Apatrides ou le Conseil du Contentieux des Etrangers est admise au séjour pour une durée limitée de 5 ans. Si au terme de ces 5 années le statut n'est pas abrogé ou retiré alors le séjour devient à durée illimitée.
Elle est mise en possession d’un Certificat d’Inscription au Registre des Etrangers (CIRE).
Retrait ?
Durant les 10 années qui font suite à la demande d’asile, le ministre ou l’Office des étrangers (OE), peut demander au CGRA le retrait du statut de réfugié.
Cette demande peut être faite :
- lorsque la protection a été octroyée sur base de fraude (faits présentés de manière altérée ou dissimulés, fausses déclarations, documents faux ou falsifiés) qui a été déterminante dans l’octroi du statut
- lorsque le comportement personnel du réfugié démontre ultérieurement l’absence de crainte de persécution dans son chef (par exemple s’il retourne dans son pays d’origine).
- s'il a été définitivement condamné pour une infraction particulièrement grave et constitue un danger pour la société ou lorsqu'il existe des motifs raisonnables de le considérer comme un danger pour la sécurité nationale
Lorsqu’il est saisi par le Ministre ou l’OE, le Commissaire général est tenu de rendre une décision motivée dans un délai de soixante jours ouvrables.
Une procédure de recours est prévue auprès du Conseil du Contentieux des Etrangers, qui est également tenu de rendre sa décision dans un délai de soixante jours ouvrables. Aucune sanction n’est toutefois mise au dépassement de ces délais.
Le ministre ou l’OE peut délivrer, au cours des dix premières années de séjour à compter de la date de la demande d’asile, un ordre de quitter le territoire au réfugié dont le statut a été abrogé ou retiré, dans les mêmes hypothèses mais doit veiler au respect du principe de non-refoulement.
Cessation ?
Dans certains cas, une personne cesse d’être réfugiée :
- Si elle s'est volontairement réclamée à nouveau de la protection du pays dans lequel elle a été persécutée, si elle est retournée s’y établir ou en ayant perdu la nationalité, elle l'a volontairement recouvrée; ou
- Si, les circonstances à la suite desquelles elle a été reconnue comme réfugiée ont cessé d'exister
Il convient cependant d’examiner si le changement de circonstances est suffisamment significatif et non provisoire pour que la crainte du réfugié d’être persécuté ne puisse plus être considérée comme fondée.
C’est le CGRA qui est compétent pour abroger le statut de réfugié.
Documents d’état civil ?
Le CGRA est compétent pour délivrer aux réfugiés reconnus, les documents ou certificats qui normalement, seraient délivrés à un étranger par ses autorités nationales. Il s’agit par exemple d’un acte de naissance ou d’un acte de mariage.
Base légale ?
- Convention internationale relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, approuvée par loi du 26 juin 1953.
- Directive 2011/95/UE du parlement européen et du conseil du 13 décembre 2011concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pourles réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection, dite directive « qualification ».
- Loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers (articles 48 à 57).