Protection subsidiaire
Qui?
Le statut de protection subsidiaire est accordé à l’étranger qui ne peut être considéré comme un réfugié et qui ne peut pas bénéficier de l’article 9ter, et à l’égard duquel il y a de sérieux motifs de croire que, s’il était renvoyé dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, il encourrait un risque réel de subir des atteintes graves, et qui ne peut pas ou, compte tenu de ce risque, n’est pas disposé à se prévaloir de la protection de ce pays et ce, pour autant qu’il ne soit pas concerné par les clauses d’exclusion.
Conditions ?
- Ne pas être considéré comme réfugié
Ces termes expriment le caractère subsidiaire de cette protection par rapport à la protection en qualité de réfugié. Toute demande d’asile sera toujours d’abord examinée sous l’angle de la Convention internationale relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951. Ce n’est ne que lorsque celle-ci ne s’applique pas que la demande sera examinée sous l’angle de la protection subsidiaire.
- Ne pas bénéficier de l’article 9 ter
Le législateur a exclu de la protection subsidiaire les personnes gravement malades, qui peuvent obtenir une autorisation de séjour sur base de l’article 9ter (renvoi à la fiche «9ter »).
- Il y a des sérieux motifs de croire
La charge de la preuve incombe au demandeur d’asile. Le demandeur d’asile doit montrer qu’il a essayé d’obtenir tous les éléments de preuve qu’il pouvait obtenir au vu des circonstances.
- Que s’il était renvoyé dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays où il avait sa résidence habituelle
Il faut que la personne ait quitté son pays pour pouvoir demander à bénéficier de la protection subsidiaire.
Le risque d’atteinte grave s’apprécie vis-à-vis du pays d’origine ou, en ce qui concerne un apatride, vis-à-vis du pays de résidence habituelle.
La protection subsidiaire ne sera pas accordée lorsqu’il existe une «alternative de protection interne », c'est-à-dire que dans une partie du pays d’origine, le demandeur d’asile n’a aucune raison de craindre d’être persécuté, ni aucun risque réel de subir des atteintes graves et qu’il est raisonnable d’estimer que le demandeur peut rester dans cette partie du pays. Lors de l’analyse de la possibilité de protection à l’intérieur du pays, les autorités devront tout d’abord vérifier si la question est pertinente dans le cas d’espèce et, ensuite, si elle est raisonnable. Si la question n’est pas pertinente, il sera inutile d’examiner si la zone proposée serait une possibilité raisonnable.
La deuxième évaluation qui doit être faite est celle de savoir s’il pourrait raisonnablement et en toute sécurité se réinstaller, sans épreuve indue, dans une autre partie de ce pays.
- Il encourrait un risque réel
Le Commissaire général a précisé que ce risque devait être :
- actuel : le risque est évalué au moment de prendre la décision par rapport à un risque en cas de retour.
- réel : et non pas hypothétique
- personnel : cela signifie que les instances d’asile chercheront à savoir qui elles ont en face d’elles. Il ne suffira pas de dire que l’on vient de tel pays pour pouvoir bénéficier de la protection subsidiaire. Il faudra donner des informations sur sa situation particulière.
Par contre, cela ne signifie pas que, en cas de conflit armé interne ou international, la personne doive prouver qu’elle est visée personnellement par les combattants. Il apparaît que le caractère personnel du risque, renvoie plus au caractère individuel de l’examen qu’à une exigence de ce que la personne soit visée à titre personnel par la menace. Il faut en effet souligner que la Belgique n’exige pas que les menaces soient individualisées.
- de subir des atteintes graves
Les atteintes graves doivent être prises en compte, qu’elle émanent de l’État¸ de partis ou d’organisations qui le contrôlent, ou encore d’acteurs non étatiques lorsque l’État ou un autre acteur de protection ne peut ou ne veut accorder une protection effective.
La loi entend par « atteinte grave » :
a) la peine de mort ou l’exécution;
Il ne suffira pas de dire que, dans son pays, le demandeur d’asile a commis tel fait susceptible de la peine de mort mais il faudra donner de sérieux motifs de croire que les autorités du pays sont au courant qu’il a commis tel fait, qu’elles ont entrepris une instruction à l’encontre du demandeur d’asile ou qu’il a été condamné à la peine de mort.
Si la condamnation à mort prononcée peut être reliée à un des cinq motifs de la Convention de Genève, c’est la Convention de Genève qui s’applique et non la protection subsidiaire.
b) la torture ou les traitements ou sanctions inhumains ou dégradants du demandeur dans son pays d’origine;
Pour déterminer si un demandeur peut prétendre à une protection subsidiaire sur la base de ce critère, il ne peut en principe pas être utilisé de critères plus sévères que ceux prévus par la Convention Européenne des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales.
Cette notion est interprétée par la Cour européenne des Droits de l’homme : afin d’être considéré comme traitement inhumain ou dégradant, un niveau minimum de gravité doit être atteint. L’interprétation de cette notion est relative, qu’elle s’apprécie en fonction du contexte et du profil de l’intéressé (âge, état de santé, etc).
Le CGRA précise certaines conditions:
- dépassement d’un seuil de douleur minimum
- outrepassement de la sanction légale et légitime
- menace à l’encontre de la vie ou de l’intégrité physique.
c) les menaces graves contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.
Cette disposition contient quatre éléments constitutifs :
- il faut qu’il y ait une menace grave contre la vie ou la personne
- d’un civil
- en raison d’une violence aveugle
- dans le cadre d’un conflit armé interne ou international
- et qui ne peut ou compte tenu de ce risque n’est pas disposé à se prévaloir de la protection de ce pays
La protection subsidiaire n’est accordée que si le demandeur d’asile ne peut trouver protection dans son pays d’origine, soit parce que les autorités de son pays ne veulent ou ne peuvent pas le protéger, soit parce qu’il ne peut raisonnablement trouver protection dans une autre partie du pays.
- pour autant qu’il ne soit pas visé par les clauses d’exclusion
Un étranger peut être exclu du statut de protection dans 3 hypothèses:
- Les personnes bénéficiant déjà d’une protection ou d’une assistance de la part des Nations Unies;
- Les personnes qui ne sont pas considérées comme requérant une protection internationale;
- la personne qui "a commis un crime grave", sans égard pour le lieu ou le moment de sa commission, ainsi que les personnes qui incitent ou participent aux crimes ou actes susmentionnés.
A titre d’exemple, ont déjà obtenu la protection subsidiaire : des ressortissants du Soudan (le Darfour), de la Somalie, du Centre ou le sud de l’Iraq, de l’Est de la Côte d’Ivoire, de Cisjordanie, de l’Erytrée. Des décisions d’octroi de la protection ont également été prise par la CPRR vis-à-vis de personnes issues de Russie (tchétchène), Côte d’Ivoire, Afghanistan, Soudan, Somalie, Serbie-Montenegro, Iraq.
A qui s’adresser ?
La procédure d’asile nouvellement adoptée est une procédure dite « à guichet unique ». En effet, les instances d’asile examinent par la même procédure l’octroi éventuel d’une protection en priorité sous l’angle de la Convention de Genève (réfugiés) et ensuite sous l’angle de la protection subsidiaire (voir fiches « procédure d’asile) et « statut de réfugié »).
La personne qui veut bénéficier de la protection subsidiaire doit donc introduire une demande d’asile auprès de l’Office des Etrangers (renvoi à la fiche « procédure d’asile »).
Durée du statut, prolongation, fin et retrait
Interdiction de refoulement
L’étranger auquel le statut de protection subsidiaire est accordé ne peut être éloigné du Royaume que par un arrêté de renvoi pris après avis de la Commission consultative des étrangers ou par un arrêté d’expulsion.
En aucun cas, l’étranger auquel le statut de protection subsidiaire a été accordé ne peut être éloigné vers le pays qu’il a fui parce que sa vie ou sa liberté y était menacée.
Statut de séjour
Le bénéficiaire de la protection subsidiaire est inscrit au registre des étrangers et admis au séjour limité. Il se voit délivrer un titre de séjour valable 2 ans, prorogeable et renouvelable, sous la forme d’un certificat d’inscription au registre des étrangers (CIRE).
A l’expiration d’une période de cinq ans à dater de la demande initiale, un séjour à durée illimitée est reconnu.
Durant le séjour limité, le permis de séjour peut être retiré à tout moment en cas de cessation de la protection subsidiaire ou d’exclusion de la protection subsidiaire.
Le statut de protection subsidiaire qui est accordé à un étranger cesse lorsque les circonstances qui ont justifié l’octroi de cette protection cessent d’exister ou ont évolué dans une mesure telle que cette protection n’est plus nécessaire. Il s’agit de s’assurer que le changement des circonstances a un caractère suffisamment profond et n’est pas temporaire.
Durant les dix premières années de séjour – à dater de l’introduction de la demande d’asile - et même si le séjour est devenu illimité, la protection peut être retirée à tout moment en cas de fraude.
Un ordre de quitter le territoire peut également être notifié à l’étranger au cours de ces dix années. Le CGRA est toutefois invité à donner un avis quant à la conformité de l’éloignement de l’intéressé vers son pays d’origine avec l’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
Le retrait est décidé par le CGRA, à la demande de l’OE. La décision est prise dans un délai de soixante jours ouvrables et doit être motivée. Un recours contre celle-ci est ouvert auprès du CCE. Dans l’attente d’une décision définitive, l’octroi du droit de séjour illimité peut être suspendu pour une période d’un an au minimum.
Le Ministre peut également décider de refuser l’octroi d’un permis de séjour à un étranger bénéficiant de la protection subsidiaire s’il y a de « sérieuses raisons de le considérer comme un danger pour l’ordre public ou la sécurité nationale ». Cette décision doit être prise sous la forme d’un arrêté ministériel de renvoi ou d’un arrêté royal d’expulsion.
Recours ?
Les recours sont les même que ceux décrits dans la procédure d’asile. L’étranger à qui le CGRA a octroyé la protection subsidiaire peut introduire un recours contre cette décision auprès du CCE.
Attention ! Le CCE a pleine juridiction et peut confirmer ou réformer la décision. Ceci implique que le CCE peut décider de tout de même reconnaître le statut de réfugié à la personne, mais peux également décider de lui refuser les deux statuts, d’asile et de protection subsidiaire !
Dispositions transitoires ?
Les dispositions relatives au statut de protection subsidiaire étaient applicables à toute demande en cours de traitement ou introduite à dater du 10 octobre 2006. Pour ces dossiers, ce sont les instances d'asile elles-mêmes qui intègrent la protection subsidiaire dans leur examen, sans démarches spécifiques nécessaires de l'étranger.
En ce qui concerne les dossiers clôturés avant le 10 octobre 2006, la loi prévoit des dispositions transitoires. Le but du législateur a été de limiter l'application de la protection subsidiaire aux dossiers clôturés. Vis-à-vis des demandeurs déboutés, la demande ne peut être formulée que dans deux hypothèses.
- La première concerne l'hypothèse où il fait état d'éléments nouveaux. La loi précise que « l'entrée en vigueur de la directive et de la loi ne peut être considérée comme élément nouveau au sens de l'article 51/8 de la loi du 15 décembre 1980, que si la demande est basée sur des éléments susceptibles de donner lieu à l’octroi de la protection subsidiaire au sens de l’article 48/3 ». Ainsi, la nouvelle loi constitue bien un élément nouveau si le demandeur est à même d’invoquer des éléments pertinents dans le cadre de l’octroi de la protection subsidiaire. La loi n’exige pas que ces éléments soient en tant que tels nouveaux. Notamment, la demande devra être prise en considération en cas d’éléments pertinents même antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi, ou en cas de changement de circonstances dans le pays d'origine, etc.
- le législateur a prévu une procédure spécifique en ce qui concerne les personnes déboutées qui disposeraient d'une clause de non reconduite en recevabilité ou d'un avis similaire au fond. Celles-ci pourront en effet s'adresser directement à la commune qui, sur instruction de l'Office des étrangers et après vérification de l'actualité de la clause, de ce que la personne n'a pas quitté le territoire après la fin de la procédure d'asile et, le cas échéant, de son identité, délivrera un CIRE d'un an.
Base légale ?
Articles 48/4, 48/5, 49/2, 55/4, 55/5 et 56 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers.
Article 3 Convention Européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.