Les régimes matrimoniaux
Généralités
Qu’est-ce qu’un régime matrimonial ?
La distinction entre le régime primaire et secondaire n’existe pas dans tous les autres pays.
Qu’est-ce qu’un régime matrimonial légal ?
Quand les règles de droit international privé doivent-elles s’appliquer aux régimes matrimoniaux?
- Les parties sont de nationalités différentes ;
- La délocalisation de certains biens ;
- L’existence d’un domicile ou d’une résidence habituelle ou d’un lieu de célébration d’un mariage dans un pays autre que celui de la nationalité commune (ou non) des parties ;
- les mariages célébrés avant le 1er octobre 2004 (Application du régime antérieur au CODIP) ;
- les mariages célébrés après le 1er octobre 2004 mais avant le 29 janvier 2019 (Application du CODIP) ;
- et les mariages célébrés (ou les choix de loi effectués) après le 29 janvier 2019 (Application du Règlement européen 2016/1103).
Les règles antérieures sont toujours applicables aux mariages qui ont été conclus dans le passé.
Mariage célébré avant le 1er octobre 2004
A défaut de choix par les époux du droit applicable à leur régime matrimonial
- Le droit de la nationalité commune des époux au moment de la célébration du mariage ;
- À défaut, le droit de l’Etat du premier « domicile » conjugal au sens de « premier établissement principal commun des époux », soit la première résidence commune des époux.
- Pour la 1ère hypothèse, on vise également le cas où l’un des époux acquiert la nationalité de l’autre époux à l’occasion du mariage.
- S’il l’un des époux possède deux ou plusieurs nationalités, on retient celle de ses nationalités qui est commune à celle de son conjoint.
- Il se peut que la résidence commune n’existe pas encore au moment où se pose la question de la détermination du régime matrimonial du couple. Dans ce cas, le critère de l’ « intention de domicile » (domicil of choice) ou des « liens les plus étroits » devrait pouvoir être utilisé.
En cas de choix par les époux du droit applicable à leur régime matrimonial
Les modifications du régime matrimonial
Mariage célébré entre le 1er octobre 2004 et le 29 janvier 2019
Quel est le droit applicable ?
Choix des parties
Les époux ont la possibilité de choisir le droit qui sera appliqué à leur régime matrimonial.
Le choix du droit applicable est-il limité ?
- Le droit de l’Etat sur lequel se trouve la résidence habituelle de l’un des époux au moment du choix ;
- Le droit de l’Etat dont l’un des époux a la nationalité au moment du choix.
À quel moment et sous quelle forme le choix du droit applicable doit-il être fait ?
- Soit par la loi de l’Etat sur le territoire duquel les époux adoptent leur choix ;
- Soit par la loi applicable au régime matrimonial des époux.
A défaut de choix de parties
(on applique le 1er critère, à défaut, le 2ème critère, à défaut, le 3ème critère)
3° dans les autres cas, par le droit de l'Etat sur le territoire duquel le mariage a été célébré. »
- Pour la 1ère hypothèse, il n’est pas nécessaire que les jeunes époux cohabitent déjà. Il suffit que l’un et l’autre fixent leur résidence habituelle sur le territoire d’un même Etat après la célébration du mariage.
- Par « résidence habituelle », il faut entendre le « lieu où une personne physique s'est établie à titre principal, même en l'absence de tout enregistrement et indépendamment d'une autorisation de séjourner ou de s'établir; pour déterminer ce lieu, il est tenu compte, en particulier, de circonstances de nature personnelle ou professionnelle qui révèlent des liens durables avec ce lieu ou la volonté de nouer de tels liens » (article 4, §2, 1° du CODIP).
En d’autres mots, le fait de résider quelques temps dans un pays sans la volonté d’y vivre durablement, par exemple dans le cadre d’un visa touristique, ne correspond pas à la définition de « résidence habituelle ».
Modification du droit applicable au régime matrimonial
Le choix des parties est limité aux lois suivantes :
- « le droit de l'Etat sur le territoire duquel ils fixeront pour la première fois leur résidence habituelle après la célébration du mariage;
- le droit de l'Etat sur le territoire duquel l'un d'eux a sa résidence habituelle au moment du choix ;
- le droit de l'Etat dont l'un d'eux a la nationalité au moment du choix. »
Quelles sont les questions réglées par le droit applicable au régime matrimonial ?
Le droit applicable au régime matrimonial règle notamment (article 53 du CODIP) :
- « la validité du consentement sur le choix du droit applicable;
- l'admissibilité et la validité du contrat de mariage;
- la possibilité et l'étendue du choix d'un régime matrimonial;
- si et dans quelle mesure les époux peuvent changer de régime, et si le nouveau régime agit de manière rétroactive ou si les époux peuvent le faire agir de manière rétroactive;
- la composition des patrimoines et l'attribution des pouvoirs de gestion;
- la dissolution et la liquidation du régime matrimonial, ainsi que les règles du partage. »
Modification du régime matrimonial sans changement du droit applicable
- Pour modifier en Belgique son régime matrimonial (décidé à l’étranger ou en Belgique), il convient de se rendre chez un notaire belge.
- Si le droit applicable au régime matrimonial ne permet pas de changer de type de régime matrimonial, les époux qui souhaitent changer de régime matrimonial doivent vérifier s’ils peuvent changer le droit applicable à leur régime matrimonial. Il est conseillé de s’adresser à son notaire le cas échéant (ou à une autre autorité compétente pour dresser les actes de mariage)
Quel est le régime matromonial applicable en droit belge ?
Le régime matrimonial est déterminé :
- Soit par le choix des époux (à ne pas confondre avec le choix du droit applicable au régime matrimonial), lequel doit avoir été consigné dans un acte notarié (acte de mariage) ;
- Soit, lorsque les époux n’ont pas fait de choix, par le Code civil (articles 1398 à 1450). En Belgique, le régime légal, applicable à défaut de choix, est un régime de communauté de biens.
- En Belgique, il est prévu que les époux règlent leurs conventions matrimoniales comme ils l’entendent, pourvu qu’elles ne contiennent aucune disposition contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs (article 1387 du Code civil).
- Ils peuvent opter pour un régime directement organisé par le droit belge (actuel ou abrogé). La simple référence à une législation abrogée n’est par contre pas admise. Dans ce cas précis, le contrat de mariage doit comprendre la description entière du régime choisi.
- Le régime matrimonial (conventionnel ou légal) prend effet à partir de la célébration du mariage. En d’autres mots, le choix du régime matrimonial doit être fait avant la célébration du mariage. A défaut, le régime légale est appliqué et ne pourra être modifié qu’en suivant la procédure de modification du régime matrimonial.
Pour plus de renseignements, voyez : https://www.notaire.be/se-marier-vivre-ensemble/le-mariage/les-regimes-matrimoniaux.
Quelles sont les autorités compétentes ?
Le Notaire
Le notaire est l’autorité compétente pour rédiger tout contrat de mariage et toute modification conventionnelle du régime matrimonial en Belgique, avant ou pendant le mariage (article 1392 du Code civil).
Le juge
Le juge belge est compétent (articles 42, 5 et 6 du CODIP) pour connaitre d’une demande concernant le régime matrimonial, quel que soit le lieu de célébration du mariage, si :
- « en cas de demande conjointe, l'un des époux a sa résidence habituelle en Belgique lors de l'introduction de la demande
- la dernière résidence habituelle commune des époux se situait en Belgique moins de douze mois avant l'introduction de la demande;
- l'époux demandeur a sa résidence habituelle depuis douze mois au moins en Belgique lors de l'introduction de la demande; ou
- les époux sont belges lors de l'introduction de la demande.
- le défendeur est domicilié ou a sa résidence habituelle en Belgique lors de l'introduction de la demande (article 5 du CODIP)
- les parties se sont mises d’accord sur la compétence du juge belge (article 6§1er du CODIP) »
Reconnaissance en Belgique d’un acte authentique étranger ou d’une décision judiciaire étrangère
Remarque : Lorsqu’une décision judiciaire étrangère ou un acte authentique étranger doit être utilisé en Belgique, il doit préalablement être légalisé par le consulat compétent (article 30 du CODIP). La Belgique a cependant ratifié des conventions internationales avec certains pays soit pour remplacer la légalisation par l’apostille, soit pour dispenser entièrement de légalisation (voyez la fiche pratique sur la légalisation).
Acte authentique étranger
Le Code de droit international privé (article 27 du CODIP) prévoit qu’un acte authentique étranger sera reconnu en Belgique sans qu’il faille recourir à une procédure spécifique si :
- sa validité est établie conformément au droit applicable (cfr. Ci-dessus sous-section I),
- l’acte réunit les conditions nécessaires à son authenticité selon le droit de l’Etat dans lequel il a été dressé (en principe, par la légalisation).
Ainsi, en principe, un contrat de mariage établi à l’étranger pourra en principe être reconnu et utilisé en Belgique sans devoir procéder à une action judiciaire.
Ce n’est que si les autorités belges refusent de reconnaitre la validité de l’acte, qu’un recours pourra alors être introduit devant le Tribunal de la famille (selon la procédure de l’article 23 du CODIP).
Décision judiciaire
Il n’existe pas de règle particulière pour la reconnaissance des jugements étrangers en matière de régime matrimonial. Il faut donc se référer aux dispositions générales applicables à la reconnaissance des décisions judiciaires étrangères (articles 22 du CODIP).
En principe la décision judiciaire étrangère est reconnue automatiquement en Belgique, il n’y a pas de procédure particulière à suivre. Néanmoins, elle ne pourra pas être reconnue si elle contrevient à l’une des conditions énumérées par l’article 25 du CODIP :
- « Si l'effet de la reconnaissance ou de la déclaration de la force exécutoire serait manifestement incompatible avec l'ordre public; cette incompatibilité s'apprécie en tenant compte, notamment, de l'intensité du rattachement de la situation avec l'ordre juridique belge et de la gravité de l'effet ainsi produit;
- Si les droits de la défense ont été violés
- Si la décision a été obtenue, en une matière où les personnes ne disposent pas librement de leurs droits, dans le seul but d'échapper à l'application du droit désigné par la présente loi;
- Si, sans préjudice de l'article 23, § 4, elle peut encore faire l'objet d'un recours ordinaire selon le droit de l'Etat dans lequel elle a été rendue;
- Si elle est inconciliable avec une décision rendue en Belgique ou avec une décision rendue antérieurement à l'étranger et susceptible d'être reconnue en Belgique;
- Si la demande a été introduite à l'étranger après l'introduction en Belgique d'une demande, encore pendante, entre les mêmes parties et sur le même objet;
- Si les juridictions belges étaient seules compétentes pour connaître de la demande;
- Si la compétence de la juridiction étrangère était fondée uniquement sur la présence du défendeur ou de biens sans relation directe avec le litige dans l'Etat dont relève cette juridiction; ou
- Si la reconnaissance ou la déclaration de la force exécutoire se heurte à l'un des motifs de refus visés aux articles 39, 57, 72, 95, 115 et 121. »
En cas de refus de reconnaissance par une autorité belge d’un jugement portant sur une question de régime matrimonial, une procédure en reconnaissance peut être introduite auprès du Tribunal de première instance (selon la procédure reprise à l’article 23 du CODIP).
Mariage célébré après le 29 janvier 2019
Le Règlement « régime matrimonial » du 24 juin 2016 (voy. ci-dessus : Généralités, 1) est entré en application le 29 janvier 2019.
18 Etats membres de l’Union européenne ont ratifié ce Règlement: Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Croatie, Espagne, Finlande, France, Grèce, Italie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Portugal, République Tchèque, Slovénie et Suède.
Ce nouveau Règlement traite de :
- la compétence en matière de régime matrimonial ;
- la loi applicable aux questions relatives aux régimes matrimoniaux ;
- la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière de régime matrimonial.
Quel est le champ d’application de ce Règlement ?
Champ d’application personnel (à qui s’applique-t-il ?)
Le Règlement concerne les couples, quelle que soit leur nationalité, ayant leur résidence dans un des Etats parties ou y possédant des biens.
Le Règlement n’est pertinent que si la situation présente un caractère international, c’est-à-dire qu’elle se caractérise par un (ou plusieurs) élément(s) d’extranéité (une résidence à l’étranger, une nationalité étrangère, un bien à l’étranger, etc.)
Champ d’application matériel (à quoi s’applique-t-il ?)
Le Règlement ne s’applique qu’aux questions relatives au régime matrimonial des époux. Il ne s’applique pas aux questions de droit fiscal ou administratif, et ne concerne pas non plus les questions touchant à la capacité des époux, à la validité du mariage célébré dans un autre pays, aux pensions alimentaires, à la succession des époux, à la sécurité sociale, etc. (article 1,§2 du Règlement).
Le Règlement définit clairement le régime matrimonial comme étant « l'ensemble des règles relatives aux rapports patrimoniaux entre époux et dans leurs relations avec des tiers, qui résultent du mariage ou de sa dissolution.» (Article 3, 1. a du Règlement)
Champ d’application temporel (à partir de quand s’applique-t-il ?)
Le Règlement est entré en application le 29 janvier 2019.
Les règles relatives à la compétence et à la reconnaissance, s’appliquent donc :
- aux procédures engagées,
- aux actes authentiques formellement dressés ou enregistrés,
- aux transactions judiciaires approuvées ou conclues,
depuis cette date.
Remarque : si une procédure judiciaire a été engagée à l’étranger avant le 29 janvier 2019, et que la décision qui en découle est rendue postérieurement à cette date, la décision pourra quand même être reconnue et exécutée conformément aux nouvelles règles de reconnaissance contenues dans le Règlement si les règles de compétence appliquées étaient conformes à celles prévues par le Règlement.
Les règles relatives au droit applicable, s’appliquent donc :
- Aux époux qui se marient après cette date
- Aux époux qui désignent la loi applicable à leur régime matrimonial après cette date, même s’ils se sont mariés avant.
Qui est le juge compétent ?
Lorsque les époux veulent soumettre à un juge une question relative à la liquidation ou au partage de leur régime matrimonial, ils doivent déterminer devant quelle juridiction agir.
A défaut de choix
En l’absence de choix des parties sur la juridiction compétente, les critères de compétence du juge varient en fonction des circonstances à l’occasion desquelles la question du régime matrimonial se pose :
- Si cette circonstance est le décès d’un des époux (article 4 du Règlement), le juge compétent est celui qui exercera sa compétence en application du règlement successoral européen.
- Si cette circonstance est le divorce, la séparation de corps ou l’annulation du mariage (article 5 du Règlement), le juge compétent pour traiter ces questions est également compétent pour traiter des questions relatives au régime matrimonial.
La logique est ainsi qu’un seul et même juge soit amené à traiter ces questions imbriquées.
Remarque :
- En cas de demande en divorce, séparation de corps ou d’annulation de mariage, il convient de se référer au règlement européen « Bruxelles IIbis» (n° 2201/2003)pour déterminer la compétence du juge.
- Dans certaines circonstances, la compétence du juge est subordonné à l’accord des époux (voyez les circonstances énumérées à l’article 5§2 du Règlement).
- Lorsqu’aucune juridiction d'un État membre n'est compétente en vertu de l'article 4 ou 5, ou dans d’autres circonstances que celles visées aux articles 4 et 5, le Règlement prévoit des critères en cascade (article 6 du Règlement). Seront ainsi compétentes, les juridictions de l’Etat membre :
- « sur le territoire duquel les époux ont leur résidence habituelle au moment de la saisine de la juridiction; ou, à défaut,
- sur le territoire duquel est située la dernière résidence habituelle des époux, dans la mesure où l'un d'eux y réside encore au moment de la saisine de la juridiction; ou, à défaut,
- sur le territoire duquel le défendeur a sa résidence habituelle au moment de la saisine de la juridiction; ou, à défaut,
- dont les deux époux ont la nationalité au moment de la saisine de la juridiction. »
Choix du juge compétent
Les époux peuvent-ils choisir devant quelle juridiction porter leur différend ?
Les époux peuvent conclure une clause d’élection de for (article 7 du Règlement), c’est-à-dire une clause par laquelle elles désignent l’autorité judiciaire qui sera internationalement compétente pour régler les questions relatives à leur régime matrimonial.
Elles peuvent le faire seulement lorsque la question du régime matrimonial ne surgit pas dans le cadre du décès d’un des époux ou d’un divorce, d’une séparation de corps ou d’une annulation de mariage.
Leur choix est limité. Les parties vont pouvoir choisir :
- Soit, les juridictions de l’Etat membre dont elles ont choisi la loi applicable (voir ci-dessous);
- Soit, à défaut d’avoir choisi un droit applicable, les juridictions dont la loi s’applique, en cas de mariage, au titre de leur première résidence habituelle commune après la célébration du mariage ou, à défaut de pareille résidence, de leur nationalité commune ;
- Soit, les juridictions de l’Etat membre dans lequel le mariage a été célébré.
Forme du choix
La convention des époux doit être écrite, datée et signée par les parties.
Remarque : La transmission par voie électronique est considérée comme une forme écrite si elle permet de consigner durablement la convention.
Compétence fondée sur la comparution du défendeur
Les juridictions d’un Etat partie peuvent également être compétentes si ce sont les tribunaux de l’Etat dont la loi est applicable et que le défendeur comparait volontairement, sans contester sa compétence (article 8 du Règlement).
Compétence de substitution
Si la juridiction d’un Etat membre normalement compétente en vertu du Règlement constate que son droit international privé l’empêche de reconnaître le mariage, elle peut éventuellement décliner sa compétence (article 9§1er du Règlement).
Si elle décide de le faire :
- Soit les parties conviennent de donner compétence à un autre Etat membre (dans les conditions de l’article 7 du Règlement), et ce dernier pourra alors statuer sur le régime matrimonial.
- Soit les juridictions compétentes seront celles dont la compétence peut se fonder sur les critères de compétence à défaut de choix des parties (articles 6 ci-dessus), ou sur la comparution volontaire (article 8 ci-dessus), ou les juridictions de l'État membre dans lequel le mariage a été célébré.
Compétence subsidiaire
Si aucune juridiction d’un Etat membre n’est compétente en vertu des critères précédents, une compétence subsidiaire peut trouver à s’appliquer si un bien immeuble de l’un ou des deux époux est situé sur le territoire de cet Etat membre (article 10 du Règlement).
Le juge compétent ne sera alors compétent que pour statuer sur les droits relatifs à ce bien immeuble.
Exemple : Un Belge et une Canadienne résident habituellement en Angleterre, ils ne sont pas d’accord sur la compétence du juge et un immeuble se situe en Belgique au sujet duquel se pose une question de régime matrimonial. Le juge belge pourra être saisi de la question à l’égard de ce seul bien immeuble.
Extension de compétence (Forum necessitatis)
Lorsqu’aucune juridiction n’est compétente en vertu des critères précédents et qu’aucun bien immeuble de l’un ou des époux n’est situé sur le territoire de l’Etat membre concerné, les juridictions d’un Etat membre peuvent, exceptionnellement, statuer sur le régime matrimonial « si une procédure ne peut raisonnablement être introduite ou conduite, ou se révèle impossible, dans un État tiers avec lequel l'affaire a un lien étroit » (article 11 du Règlement).
C’est ce qu’on appelle le Forum necessitatis.
L’Etat membre dont la juridiction se déclarerait compétente sur cette base doit toutefois présenter un lien suffisamment étroit avec l’affaire en question.
Quelle est la loi applicable ?
La désignation de la loi applicable par le Règlement revêt trois caractéristiques importantes :
- Elle est d’application universelle: la loi applicable s’applique, même si la loi désignée par le Règlement n’est pas celle d’un Etat membre ;
- Elle forme une unité: la loi désignée s’applique à l’ensemble des biens meubles et immeubles des époux, peu importe le lieu où ces biens se trouvent ;
- Elle est définitive : la loi désignée s’appliquera définitivement tant qu’aucun autre choix n’interviendra pour le remplacer, et ce donc même si le facteur de rattachement est modifié ultérieurement. On retient le facteur de rattachement du moment où est conclu le mariage ou le contrat modificatif.
Choix du droit applicable
Comme c’était déjà le cas avant, les parties peuvent se mettre d’accord sur le droit applicable à leur régime matrimonial.
Quand le choix doit-il être fait pour être valable ?
Avant, au moment ou au cours du mariage.
Si le choix est effectué au cours du mariage et que le droit applicable est modifié, cette modification n’a d’effet que pour l’avenir sauf si les époux en disposent autrement et sachant que les effets ne sont pas opposables aux tiers auxquels elle ne peut nuire.
Les époux ont-il un choix limité quant au droit applicable à leur régime matrimonial ?
Le Règlement laisse un choix limité aux époux quant au droit applicable à leur régime matrimonial :
- Soit la loi de l’Etat où l’un des (futurs) époux a sa résidence habituelle au moment de la conclusion de la convention ;
- Soit la loi de l’Etat dont l’un des (futurs) époux a la nationalité au moment de la conclusion de la convention.
Remarque : En vertu du principe de l’universalité, rien n’interdit aux parties de choisir la loi d’un Etat tiers.
Quelle est la forme que doit revêtir leur choix ?
Un écrit est toujours nécessaire et doit être daté et signé par les deux époux.
Les époux doivent respecter les règles de formes supplémentaires prévues par la loi de l’Etat membre dans lequel les époux résident habituellement au moment de faire leur choix (ou dans lequel un des époux a sa résidence s’ils n’ont pas la même résidence).
Pour la validité du consentement et du fond de la clause, les époux doivent en plus respecter les règles de formes spécifiques prévues par l’Etat dont la loi a été choisie si elle est différente de celle de leur résidence habituelle.
Exemple : Ainsi, le choix du droit belge fera l’objet d’un acte notarié respectant les formalités du droit belge.
A défaut de choix du droit applicable
Si les parties n’ont pas choisi le droit applicable à leur régime matrimonial, le Règlement prévoit un système de critères en cascade pour déterminer la loi applicable (Article 26 du Règlement). Il s’agira de celle :
« a) de la première résidence habituelle commune des époux après la célébration du mariage; ou, à défaut,
b) de la nationalité commune des époux au moment de la célébration du mariage; ou, à défaut,
c) avec lequel les époux ont ensemble les liens les plus étroits au moment de la célébration du mariage, compte tenu de toutes les circonstances. »
Remarques :
- Si les époux ont plus d’une nationalité commune au moment de la célébration du mariage, on se référera prioritairement au critère a) et subsidiairement au critère c).
- A la demande d’un époux, le tribunal compétent peut exceptionnellement décider que la loi d’un Etat – autre que celle de la première résidence conjugale commune – sera appliquée Cette clause d’exception n’est pas applicable si les parties ont choisi le droit applicable. (Article 26, al.3 du Règlement).
Quelle est la portée du droit applicable ?
Le droit applicable régit (article 27 du Règlement) :
- la classification des biens des deux époux ou de chacun d'entre eux en différentes catégories pendant et après le mariage;
- le transfert de biens d'une catégorie à une autre;
- les obligations d'un époux qui découlent des engagements pris par l'autre époux et des dettes de ce dernier;
- les pouvoirs, les droits et les obligations de l'un des époux ou des deux époux à l'égard des biens;
- la dissolution du régime matrimonial, sa liquidation ou le partage des biens;
- les effets du régime matrimonial sur un rapport juridique entre un époux et des tiers; et
- la validité au fond d'une convention matrimoniale.
La loi applicable au régime matrimonial s’applique à l’ensemble des biens relevant de ce régime, quel que soit le lieu où les biens se trouvent (article 21 du Règlement).
Est-il possible d’écarter la loi choisie ou désignée par le Règlement?
Les règles de la loi applicable seront écartées au profit de la loi du juge ou de l’autorité saisie afin d’assurer le respect des règles impératives de cette dernière dont le respect est jugé crucial (article 30 du Règlement).
Exemple : les règles de droit interne relative à la protection du logement familial sont parfois jugées si importantes que le juge les appliquera même si elles sont contraires aux règles prévues par le droit applicable.
Les règles de la loi applicable seront également écartées lorsqu’elles entrent manifestement en contradiction avec l’ordre public de l’Etat dont relève le juge ou l’autorité saisie (article 31du règlement).
Modification du droit applicable
Le droit applicable au régime matrimonial, qu’il résulte du choix des époux ou non, peut être modifié en Belgique par la volonté des époux et ce, quel que soit le lieu où le mariage a été célébré. Cette possibilité est offerte à tous les couples, qu’ils se soient unis avant ou après l’entrée en vigueur du Règlement.
Les époux peuvent ainsi choisir le droit applicable à leur régime matrimonial avant la célébration du mariage ou au cours du mariage. Ce choix peut être le premier ou peut venir modifier un choix antérieur. Ce choix porte en tout cas sur l’ensemble des biens des époux.
Le changement de droit applicable n’aura en principe d’effet que pour l’avenir. Mais, les époux peuvent en décider autrement à condition de ne pas porter atteinte aux droits que les tiers ont acquis sous le régime de l’ancienne loi applicable au régime matrimonial.
Le choix des parties est toujours limité et ne peut désigner que (article 22§1er Règlement) :
- « Soit, la loi de l'État dans lequel au moins l'un des époux ou futurs époux a sa résidence habituelle au moment de la conclusion de la convention;
- Soit la loi d'un État dont l'un des époux ou futurs époux a la nationalité au moment de la conclusion de la convention. »
Remarques :
- Si les époux sont présents sur le territoire belge et optent pour une législation étrangère, la loi belge devra être respectée pour la forme de la modification intervenue. La législation étrangère devra être respectée pour les conditions de fond de la modification envisagée.
- En Belgique, la modification du droit applicable doit se faire devant notaire (voyez les articles 1392 à 1395 du Code civil).
- Si le régime matrimonial des époux est le régime légal, le changement de droit applicable entrainera également un changement de régime matrimonial en faveur du régime légal prévu par le nouveau droit applicable.
- Le changement intervenu en Belgique n’aura peut-être pas d’effet dans un autre pays (la reconnaissance à l’étranger de l’acte dans lequel un nouveau droit applicable a été désigné dépend des conditions de la reconnaissance des actes authentiques prévues dans le pays concerné).
Reconnaissance en Belgique d’un acte authentique étranger ou d’une décision judiciaire étrangère
Actes authentiques
Le Règlement prévoit que les actes authentiques ont la même force probante dans tous les Etats membres pour autant que cela ne soit pas manifestement contraire à l’ordre public de l’Etat membre concerné. Cette force probante pourra le cas échéant être attestée au moyen d’un formulaire spécifique à remplir par l’Etat membre qui a délivré l’acte (article 58 du Règlement).
D’autre part, le Règlement prévoit que pour qu’un acte authentique établi par un Etat membre puisse avoir force exécutoire dans un autre Etat membre, il doit être déclaré exécutoire au moyen d’une procédure judiciaire spécifique conforme aux articles 44 à 57 du Règlement (article 59 du Règlement).
Décisions judiciaires
En principe la reconnaissance des effets de décision judiciaire étrangère est automatique, sans qu’il n’y ait besoin de suivre une procédure particulière (article 36§1er du Règlement). Néanmoins, elle ne sera pas reconnue si elle contrevient à l’une des conditions énumérées par le Règlement (à l’article 37) :
« a) si la reconnaissance est manifestement contraire à l'ordre public de l'État membre dans lequel la reconnaissance est demandée;
b) dans le cas où elle a été rendue par défaut, si l'acte introductif d'instance ou un acte équivalent n'a pas été signifié ou notifié au défendeur en temps utile et de telle manière qu'il puisse se défendre, à moins qu'il n'ait pas exercé de recours à l'encontre de la décision alors qu'il était en mesure de le faire;
c) si elle est inconciliable avec une décision rendue dans une procédure entre les mêmes parties dans l'État membre dans lequel la reconnaissance est demandée;
d) si elle est inconciliable avec une décision rendue antérieurement dans un autre État membre ou dans un État tiers entre les mêmes parties dans un litige ayant le même objet et la même cause, lorsque la décision rendue antérieurement réunit les conditions nécessaires à sa reconnaissance dans l'État membre dans lequel la reconnaissance est demandée. »
En cas de refus de reconnaissance par une autorité belge d’un jugement portant sur une question de régime matrimonial, une procédure en reconnaissance peut être introduite auprès du Tribunal de première instance (selon la procédure reprise aux articles 44 à 57 du Règlement).
D’autre part, comme pour les actes authentiques, le Règlement prévoit que pour qu’une décision judiciaire établie par un Etat membre puisse avoir force exécutoire dans un autre Etat membre, elle doit être déclaré exécutoire au moyen d’une procédure judiciaire spécifique conforme aux articles 44 à 57 du Règlement (article 42 du Règlement).